SAINTE VIE – LA TUDERRIERE

L’esprit du lieu

Sainte Vie la Tuderriere

L’Esprit du lieu

La demeure de Sainte Vie – La Tuderriere est batie sur l’ancienne nécropole d’Apremont.
Une nécropole pour les anciens gallo-romains de la région était considérée comme un lieu sacré où l’homme peut vivre consciemment son tré-pas.
Ces trois pas ou ce « pas de plus » (ultreia) au-delà et à travers la réalité connue qu’est l’accomplissement de sa vie. Chaque « pas de plus » étant considéré comme un « passage » vers un autre niveau de réalité (passage en hébreu se dit pessah traduit en français par Pâques).
La réalité est une, elle se manifeste sous différents modes qui sont aussi différents mondes où niveaux de réalité.
En surface, le Réel nous apparaît comme matériel ; si nous faisons « un pas de plus », si nous descendons dans les profondeurs de la matière, le Réel nous apparaît comme énergie.
Si on fait « un pas de plus », si on explore les profondeurs de cette énergie on découvre l’information, le Réel nous apparaît comme information créatrice.
Si on fait un pas de plus », si on s’interroge sur l’origine de cette information, on découvre la conscience, le Réel nous apparaît comme Conscience.
Si on fait « un pas de plus », si on s’approche de la conscience pure, on découvre le Silence, « ce dont on ne peut parler »…Certains évoquent l’Amour silencieux, la sainte Vie qui donne à la conscience, à l’information, à l’énergie et à la matière d’exister…
Ces « pas de plus », ces « passages » de la matière à l’énergie, de l’énergie à l’information, de l’information à la conscience, de la conscience au silence…, ne sont pas à vivre seulement dans une nécropole au jour du trépas, à la fin de cette vie mortelle.
Il n’est pas nécessaire d’attendre de mourir pour s’éveiller à la vie qui était là avant nous, et qui est là après nous, et que certains appellent la Vie éternelle, la vie véritable ou sainte Vie.
C’est ainsi que la nécropole d’Apremont devint un lieu d’initiation, si initiation veut dire « mourir avant de mourir » s’éveiller à ce qui ne meurt pas.
Qu’est-ce qui ne meurt pas ?
Notre corps, notre psychisme, notre intelligence, nos rêves ? Nos plus fortes sensations, émotions, sentiments, songes ?
Si nous sommes attentifs, si nous nous observons, nous découvrons que tout cela est impermanent, transitoire, mortel, que cela n’a aucune existence durable…
Qu’est-ce qui reste quand il ne reste plus rien ? Le silence, sans doute, une conscience silencieuse, une pure présence ?
Il existe de nombreuses formes d’initiations, abruptes ou progressives pour entrer dans cette pure présence où nous sommes depuis toujours. Le Silence, unique réel d’où viennent toutes choses et où retournent toutes choses. Certains diront : silencieux amour où il nous est donné d’aller, de venir et de revenir…
L’attention, l’observation, la méditation, l’oraison, la contemplation, sont des « pratiques premières » (plutôt que primitives) toujours utiles et d’actualité pour appréhender ce silence inappropriable qui sans cesse nous échappe et qui pourtant sans cesse nous contient.
Avant mais surtout à partir du VIe siècle, avec la venue de saint Tuder qui donnera son nom à ce lieu et à la rivière qui coule à ses pieds, l’ancienne nécropole deviendra un lieu d’initiation chrétienne.
L’initiation chrétienne qui est, elle aussi, un très –pas, trois pas et plus, dans les profondeurs de « Je suis », Yeshoua le Christ
Ces « très–pas » sont les trois étapes du rituel orthodoxe du baptême qui est commune à toutes les églises d’orient et d’occident durant le 1er millenaire du christianisme.

1ere étape : purgative, plonger dans l’eau, nettoyage des conséquences négatives de nos actes passés, (personnels et collectifs), effacement de la faute et de l’erreur originelles, ( se croire séparé de Dieu, vouloir être dieu sans Dieu)

2eme étape : Illuminative, onction d’huile sur tous les centres vitaux de l’être humain, ouverture des portes de la perception, le corps considéré comme temple de l’Esprit et non comme tombeau de l’âme.

3eme étape : unitive, eucharistie, communier à la vie du Christ, la sainte Vie qui est relation avec le Père, la Source de toute vie, dans « le souffle et la vigilance », l’amour silencieux qui est l’Esprit saint.

Il s’agit bien d’une plongée à travers notre petit moi, je suis, dans la conscience d’un « Je suis » infinie, qui est celui de Yeshoua, « avant qu’Abraham fut : Je suis » (Jn 8/58) « Je suis en mon Père, vous êtes en moi, et je suis en-vous » (Jn, 14/20)
Dans sa forme rituelle, ces trois étapes de l’initiation chrétienne sont toujours pratiquées à Sainte vie-La Tuderriere.
Dans une forme plus intériorisée, elle est également proposée selon la tradition hésychaste : plongée dans le cœur silencieux du Réel, là où demeure, « Je suis », Yeshoua, tourné vers le Père (pros ton theon), dans le souffle et la vigilance, dans l’amour et la conscience qu’est l’Esprit Saint à travers l’invocation ou l’évocation du « nom au-delà de tout nom »
Cette pratique était celle de Saint Tuder.
Selon la légende (légenda, ce qui doit être lu ou dit).
Celui-ci aurait transmis à l’Occident la sagesse de la tradition apophatique à travers les écrits de Denis le Théologien (appelé aussi l’Aréopagite), que Jean Scot Erigène traduira par la suite et qui seront repris par tous les grands théologiens du Moyen Âge, Thomas D’Aquin qui le cite plus souvent que Saint-Augustin, Bonaventure, mais surtout Maitre Eckhart dont la pensée, après bien des éclipses, est particulièrement vivante aujourd’hui :
De Dieu, le Réel/ Un et infini, on ne peut rien dire, ou on ne peut en parler que de façon négative : « il n’est pas ceci, pas cela… »
Il est au plus intime de nous et au-delà de nous, tout autre et tous notre. Seule l’expérience, la plongée dans la profondeur du réel peut nous le révéler :

Là, il est là
Là, je suis là
Là, tu es là
Là, nous sommes là
Là, tout est là.

Infiniment proche est toujours inaccessible, tout autre que moi et plus moi que moi-même.
C’est cette expérience, à la fois singulière et partagée qui demande à être vécue ici à Sainte Vie-La Tuderriere.
Des aménagements nécessaires à une vie de silence et de solitude, tout en demeurant dans une proximité amicale des uns et des autres est à prévoir ( constructions d’ermitages, lieu de méditation et de célébration commune).